L’idéologie du « gender »

Les chrétiens ne peuvent plus ignorer l’idéologie du gender (« genre » en français[1]) qui est aujourd’hui à notre insu diffusée sournoisement sur toute la planète, remettant totalement en cause l’anthropologie judéo-chrétienne.

Le « gender » ou le refus de la différence sexuelle :

Cette théorie soutient que les différences entre l’homme et la femme, au-delà des différences morphologiques évidentes, ne correspondent pas à une nature fixe, mais sont des produits de la culture d’un pays et d’une époque déterminée, quelque chose d’attribué de façon conventionnelle par la société qui n’a pas nécessairement valeur « humaine » ! Selon les théoriciens du gender[2] : « L’individu postmoderne ne se reconnaît plus dans la société “hétérosexiste” : la différence des sexes est une dictature puisqu’elle est imposée par la nature. Pour être libre, l’individu doit pouvoir se choisir. Son droit le plus fondamental est “le droit d’être moi”, de se choisir en permanence alors que la nature impose d’être un homme ou une femme ».

C’est à partir de la décennie 1960-1970 dans les milieux académiques américains que s’est répandu le « féminisme du genre » ou « gender » du précédent mouvement pour l’égalité des sexes. Le livre de Judith Butler (1990), considéré comme une référence, intitulé : « Trouble dans le genre. Pour un féminisme de la subversion », se fonde sur une analyse de l’histoire comme lutte des classes des oppresseurs contre les oppressés, le premier des antagonismes étant celui existant entre l’homme et la femme dans le mariage monogamique.

Initialement, le féminisme approuvait l’idée que « l’identité sexuelle et le genre coïncident ». Ce lien a été remis en question progressivement par les féministes radicales qui ne se « sont pas satisfaites de l’égalité des sexes et de la parité ». Fondée sur une dialectique entre nature et culture, cette théorie propose de s’affranchir de la nature et de la « dictature » de la différence sexuelle. Il faut donc, pour sortir de l’oppression, « déconstruire le genre, la famille et la reproduction ».

Une entreprise de déconstruction :

Alors que le « sexe » manifeste qu’une différence existe entre l’homme et la femme en faisant référence à leurs caractéristiques biologiques, le terme de « genre » formule une « option selon laquelle on choisit précisément le “genre” de son choix » : il renvois aux rôles et aux comportements susceptibles de varier selon les sociétés. Prétendant que l’être humain est « neutre » à sa naissance et qu’un rôle masculin ou féminin lui est imposé par le milieu culturel où il vit, les théoriciens du gender déconstruisent l’universalité de la différence sexuelle entre l’homme et la femme sur lequel repose la société. En clair, l’être humain pourrait choisir son « genre » : il pourrait opter pour être hétérosexuel masculin, hétérosexuel féminin, homosexuel, lesbienne, bisexuel ou indifférencié (neutre[3]…) !

Outre la déconstruction de l’identité sexuelle, le gender déconstruit la famille où la femme « est maintenue en esclavage », ce qui « conditionne les enfants à accepter le mariage et la féminité comme naturels ». La famille doit être désormais « choisie » et polymorphe : monoparentale, homoparentale, recomposée.

La maternité aussi doit être déconstruite pour être également « choisie ». Les femmes doivent s’en remettre à la technique pour sortir des contraintes corporelles : les mères porteuses, l’utérus artificiel apparaissent comme des moyens de libération. « L’enfant ne se reçoit pas, il se désire, il se programme ».

Le gender inspire des glissements sémantiques pour opérer sa déconstruction des identités : si la parenté devient « parentalité » c’est pour « opposer les trois composantes de la filiation : la filiation biologique, la filiation juridique et la filiation sociale, pour choisir celle qui convient ». L’établissement de ces nouvelles filiations mène à revendiquer un « droit à l’enfant » universel, et la procréation médicalement assistée doit satisfaire le désir d’enfant. Au final, « tous les moyens sont bons pour garantir le “droit à l’enfant” au mépris de l’enfant lui-même, de son identité, de sa croissance dans un cadre stable avec son père ou sa mère.

Sur le simple plan de la société des hommes, il est évident que la diffusion de cette théorie va dans le sens de renforcer « la culture de dissociation de notre société : dissociation entre identité et comportement, entre sexualité et procréation, entre union et filiation, entre parenté et parentalité ».

Une attaque en règle de l’anthropologie judéo-chrétienne :

Mais cette contre-culture est encore plus pernicieuse : on voit clairement qu’en s’attaquant entre autres choses, à la sexualité, à la reproduction, aux relations familiales, à l’éducation, mais aussi au langage, son objectif final est de déconstruire la société basée sur l’anthropologie et l’éthique judéo-chrétienne, et, bien entendu, la foi elle-même.

Quand on sait combien l’Eglise a toujours défendu l’importance vitale de la famille comme « première cellule de la société » en tant que « première cellule naturelle », indispensable pour la « construction de la personne humaine », il est clair que la première cible est la cellule familiale qui frapperait la femme de façon négative, la réduirait à l’esclavage, conditionnerait les enfants à accepter la famille, le mariage et la maternité comme quelque chose de naturel…

Monseigneur Tony Anatrella, psychanalyste, spécialiste en psychiatrie sociale et consulteur du Conseil Pontifical pour la famille et du Conseil Pontifical pour la santé, ne cesse de dénoncer les effets délétères de cette théorie qui amène à considérer la maternité comme un “handicap et une injustice” pour les femmes et dont il faudrait les libérer : idée qui explique la multiplication des campagnes en faveur de la contraception et de l’avortement dans le monde.

Il explique bien la façon dont la théorie du gender utilise le langage pour faire avancer ses idées : « Qui a réfléchi sur le concept de “gouvernance” qui est un terme chantant et joli mais qui n’a pas le même sens que celui de gouvernement. Il en va de même avec le concept de “parentalité” qui succède à celui de “parenté” et qui induit une toute autre signification. Ou encore le concept de “santé reproductive” qui n’a rien à voir avec l’accompagnement des mères et des familles mais qui signifie la propagation des moyens contraceptifs et abortifs. Pour nous, chrétiens, il est préférable de lui substituer le concept de “santé familiale” qui englobe le père, la mère et les enfants : bref ” la cellule familiale”»[4].

Marguerite A. Peeters[5] est celle qui a certainement le plus étudié le gender qu’elle appelle, elle, un phénomène culturel : « Le gender déconstruit la structure anthropologique de l’homme et de la femme telle qu’elle a été créée par Dieu, qui est Père, Fils et Saint-Esprit. Autrement dit, le dessein d’amour trinitaire de Dieu sur l’homme et la femme. Le combat dans lequel nous sommes concerne l’homme lui-même, son origine divine et sa prédestination trinitaire. La mort de l’homme n’est-elle pas une conséquence de la « mort de Dieu » proclamée par Feuerbach et Nietzsche ? Nous sommes tous faits pour être père ou mère, fils ou fille, époux ou épouse, frère ou sœur. Or en niant la complémentarité anthropologique homme-femme, en voulant faire de tous des citoyens radicalement “égaux”, en s’attaquant à la maternité comme une injustice sociale, en réduisant l’homme et la femme à leur fonction sociale, en en faisant des « partenaires » liés entre eux par un “contrat”, on crée une culture qui empêche la réalisation de notre vocation humaine universelle »[6].

Beatriz Vollmer de Coles, spécialiste des questions philosophiques relatives au gender, note aussi avec juste raison que séparer le sexe et le genre, c’est comme séparer le corps et l’âme : on met en péril l’intégrité humaine : « Nous avons affaire ici à une forme contemporaine de dualisme manichéen. L’idéologie du gender est le cœur d’une nouvelle gnose, et ceux qui y adhèrent ne sont astreints à aucune norme de conduite morale. Au cœur de cette gnose, on trouve la négation d’un lien quelconque entre la dimension transcendante de la sexualité humaine et la dimension purement physiologique de cette sexualité. Moyennant ce divorce – cette aliénation – l’homme et la femme choisissent leur sexe en changeant au gré de leurs convenances individuelles. Tous ceux qui n’acceptent pas cette gnose doivent évidemment être dénoncés comme appartenant à une culture dépassée qu’il convient de combattre ».[7]

Une idéologie sournoise et diffuse :

Ce fut à la 4ème conférence mondiale des Nations Unies sur la femme de 1995 de Pékin que cette idéologie a été diffusée par une forte campagne faisant de ce concept le résultat d’un prétendu consensus mondial. Depuis ce sommet, la « perspective du genre » s’est développée petit à petit dans différents milieux non seulement dans les pays industrialisés, mais aussi dans les pays en voie de développement, notamment en Afrique. Pour Marguerite Peeters : « L’ampleur du phénomène est incommensurable. Le gender s’est intégré au cœur des politiques internationales, régionales, nationales et locales, des instruments juridiques (comme le Protocole de Maputo en Afrique), des manuels scolaires, des codes éthiques des entreprises, des ONG de développement, des Objectifs pour le Développement du Millénaire (ODM) censés être atteints d’ici 2015. Il s’est imposé comme priorité transversale de la coopération internationale. D’ores et déjà, le gender a pénétré dans nos sociétés par tous ses pores… Le gender avance masqué. ».

Le gender appartient pleinement à la postmodernité occidentale. M. Peeters dit encore : « Comme tous les concepts postmodernes, il opère une double déconstruction : d’une part celle du dessein de Dieu, et, d’autre part, celle des abus de la modernité. Le gender tente de répondre aux désordres réels du machisme, de l’autoritarisme, du cléricalisme, du paternalisme, de la domination de l’homme sur la femme qui est une conséquence du péché originel, comme nous le révèle le récit de la Genèse. Parlant à la femme après le chute, YHWH dit : “Ta convoitise te poussera vers ton mari et lui dominera sur toi” (Gen. 3, 16). Le gender répond à la domination masculine, non par l’amour et la réconciliation, mais par une révolte et une prise de pouvoir de la femme qui cherche à devenir l’égale de l’homme en termes de pouvoir social. Plaisir, pouvoir, possession de “connaissance” : ces tentations ont été les grands thèmes de la révolution féministe et sexuelle occidentale qui s’est mondialisée dans les années 1990 ; à travers le gender, elles sont même devenus une norme de la coopération internationale actuelle ».

Le gender est un « signe des temps » :

Marguerite Peeters a raison de rappeler que : « l’aspect le plus préoccupant de la révolution culturelle mondiale et de l’ingénierie sociale qu’elle opère à une vitesse foudroyante est son lien direct avec l’apostasie ». Depuis la naissance du Christ, nous sommes dans le combat eschatologique des derniers temps. Force est de constater que la révolution culturelle à laquelle nous assistons n’est pas sans conséquences pour la foi. Nous ne pouvons pas ne pas penser à la question du Christ : “Quand le Fils de l’Homme reviendra, trouvera-t-il encore la foi sur la terre ?”… L’idéologie du gender remet totalement en question les fondements naturels qui ont présidé à la vie du monde depuis le commencement. Le Malin a déjà tout essayé… Il s’attaque cette fois au cœur même de l’humanité, au cœur même de la vie. Suprême défi au Créateur. L’idéologie du gender est le péché suprême, celui qui va contre l’Esprit Créateur[8]. Celui dont il nous est dit qu’il ne sera pas pardonné.

Souvent par ignorance, beaucoup de chrétiens risquent de se laisser séduire par cette nouvelle idéologie. Plus que jamais, combien devons-nous nous informer et nous former en restant fidèles au Magistère, sûrs que l’Eglise, à la suite du Christ, conduit les hommes non pas à la perdition mais sur un chemin de vie.

Dr Patrick Theillier

Pour approfondir le sujet :

« La mondialisation de la révolution culturelle occidentale » de Marguerite Peeters (iis@skynet.be) et www.dialoguedynamics.com

– un site Web : www.femina-europa.org

Alliance pour un nouveau féminisme européen contre le gende:nouveaufemeinisme@gmail.com


[1] Terme qu’il vaut mieux garder en anglais en tant que concept.

[2] Les citations en italique de cette page proviennent de www.libertepolitique.com (Elisabeth Monfort) 28/05/10

[3] Option déjà validée en Australie sur les cartes d’identité !

[4] http://cathoweb.org/catho-news/impasse-de-la-theorie-du-genre.html

[5] Belgo-américaine, rédactrice en chef de l’ « Interactive Information Services », un service d’information spécialisé dans l’étude de la mondialisation, elle avait abordé ce thème lors du congrès international organisé à Rome par le conseil pontifical pour les Laïcs, à l’occasion des 20 ans de « Mulieris dignitatem ».

Nous avons eu la joie de nous entretenir longuement avec elle à un Congrès sur le Gender à Pampelune, organisé par l’Université de Navarre en février 2011.

[6] Zenit du dimanche 23 mars 2008 (ZENIT.org).

[7] Introduction du chapitre « Genre » : nouvelles définitions, page 585 du Lexique des termes ambigus et controversés sur la famille, la vie et les questions éthiques du Conseil Pontifical pour la famille. (Pierre Tequi éditeur) : à avoir dans sa bibliothèque !

[8] Message du pape Benoît XVI pour Noël à la Curie romaine, le 22 décembre 2007.

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http://p.theillier.pagesperso-orange.fr/index.htm